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Sonnet aux traverseurs de rue

Sonnet aux traverseurs de rue


Ils nous ont bien dit qu’on était essentiels
Pour faire tourner leur belle économie.
Coûte que coûte, nous n’avions pas de prix.
Ils nous ont pris cinq sous pour nos toits et nos Noëls.

Ils nous ont promis l’estime, des primes et la lune,
Nous avons eu la fin des droits, la faim du mois.
Nous en avons soupé de leurs festins d’entre soi,
Nous avons eu le mépris, des miettes et la rancune.

Ils nous ont dit de traverser la rue en riant,
Nous, la cohorte des illettrés et des sans-dents.
Ils nous ont donné plus de temps et de galère,

Pour passer du labeur à la poussière.
En pleine nuit, tel un malfrat, la première cordée
Nous a volé nos luttes et deux années.


A.G., le 16 avril 2023