Le Pays de l'horizon lointain

Édimbourg, 1768 : Walter Grassie naît dans une famille de bourgeois écossais qui le destine à devenir avocat. Lors de son Grand Tour, il assiste à la Révolution française, qu’il ne voit pas d’un très bon oeil, puis continue par l’Italie, à Venise, où il découvre l’absinthe et les cabinets de curiosités les plus divers, l’opium et la franc‑maçonnerie.
De retour en Écosse, il rencontre l’amour : Fiona, qu’il épouse et promet de toujours aimer…
Ce roman questionne l’inscription de l’histoire individuelle dans l’Histoire. Il souligne la rencontre de l’ordinaire et de l’historique, questionne la nature du monde et celle du réel, la place de l’homme en leur sein : voilà ce que sont les grands et les petits événements, l’Histoire et la vie de chacun.


Éditions Joëlle Losfeld

« Le Pays de l’horizon lointain » a reçu le prix « Révélation 2020 » de la Société des Gens De Lettres.

Le point de vue de l'auteur

Le Pays de l’horizon lointain est un roman qui montre comment la vie d’un homme s’écrit dans son temps - ici, cinquante ans de la vie d’un Écossais, entre 1768 et 1818. Ou pour le dire de manière plus philosophique, comment les histoires s’inscrivent dans l’Histoire.

Mais raconter les moments-clefs de la vie d’un homme, raconter des histoires crédibles, originales ou étranges ne suffit pas. Ce qui importe, c’est la manière dont on les écrit, c’est une affaire de voix et de styles. C’est le travail et l’œuvre de l’écrivain.

Je voudrais juste partager ici quelques minuscules faits qui ont contribué à l’écriture de ce roman. Quelques faits parmi la quantité considérable de documentation lue, utilisée, digérée, transposée…

L'exécution de Deacon Brodie

Walter Grassie est le personnage principal du Pays de l’horizon lointain. Peut-on dire que c’est le « héros » du livre? Je ne sais pas. En tout cas, il assiste à la pendaison de Deacon Brodie, le 1er octobre 1788, à Edinburgh. Le doyen de la guilde des ébéniste d’Édimbourg était un bourgeois établi et respecté le jour, et un brigand, un noceur et un voleur la nuit. La pendaison de Brodie marque profondément Walter.

Adam de Cardonnel

Walter Grassie a parmi ses mentors Adam de Cardonnel, éminent « antiquaire » et grand numismate de son pays. Là encore, cette relation a une grande influence sur lui. Adam de Cardonnel est le premier a rédiger une somme considérable sur les monnaies d’Écosse.

Série sur les monnaies d'Écosse

Les Numismata Scotiæ est publié en 1786. L'ouvrage est illustré de planches détaillées de la main de Cardonnel.

Rien

Le 14 juillet 1789, le jour de la prise de la Bastille, Louis XVI écrit:
« Mardy… … 14 Rien » dans son journal. J’ai envie de dire que… tout est dit par cette annotation. Si cela ne titille pas l’imagination d’un écrivain et celle de ses lecteurs… Or ce que voit Walter Grassie ce 14 juillet 1789, ce n’est pas « rien ».

Critiques & analyses


Excellente et subtile critique de Virginie Bloch-Lainé dans le Libé Livres du samedi 22 février.

«Grand tour» épique et piques

1789, un Écossais fait halte à Paris


Au XVIIIe siècle, la mode du «grand tour» atteint son apogée. Les jeunes hommes bien nés effectuent en Europe un voyage initiatique d’une année pour polir leurs humanités. Walter Grassie, héros de fiction né à Edimbourg en 1768 et fils de magistrat, part en 1788, une fois ses études achevées, visiter le «Continent». Natif d’une ville située «dans les marches du monde, à la périphérie de la guerre», il arrive dans une France qui vit l’aube de sa Révolution. Le voici donc qui plonge directement dans le grand bain. Ponctué de chapitres brefs dont les titres sont des dates, le Pays de l’horizon lointain (c’est-à-dire l’Ecosse) nous emporte aux côtés d’un Walter déboussolé. D’une subtile sobriété, suggérant une pensée tantôt sombre, tantôt ironique, l’écriture d’Alain Gnaedig embrasse un monde en mouvement et exotique aux yeux d’un calviniste que les codes latins déstabilisent. Il y a, dans le style de Gnaedig, par ailleurs traducteur et éditeur de littérature nordique chez Gallimard, une sérénité qui permet aux bouleversements observés par Walter de briller. (…)

 

Très belle chronique de Jean-Claude Lebrun, parue dans L'Humanité de jeudi 5 mars. Il souligne certaines perspectives et références qui structurent le roman.

Un homme des lumières

"Cet élégant petit livre mérite assurément l'attention."

"Les références cachées jalonnent en effet le récit qu'Alain Gnaedig déroule à la façon d'un calendrier, avec des dates en tête des courts chapitres. Ainsi, le 21 juin 1791, Walter Grassie, maintenant revenu au pays, s'il avait "à nouveau tenu un journal", signale malicieusement le narrateur, "aurait été tenté d'écrire “rien”". À l'instar de Louis XVI le 14 juillet 1789. Ce 21 juin 1791, celui-ci était justement arrêté à Varenne…"

"Il assiste au grand spectacle d'une rupture historique, en décrit et dessine des épisodes, sans forcément en saisir tout le sens. Mais il en consigne minutieusement les symptômes, en voyageur toujours curieux. Ce fut pour lui d'abord une "orgie de sensations", en illustration du matérialisme des Lumières, pour lequel les idées ne peuvent venir que des sens. Locke n'est pas loin. Tout comme Stendhal, dans l'écriture de ce texte subtil et délicat, magistralement composé, qui interroge les modalités de notre inscription dans l'Histoire."

Un article sensible de Véronique Cassarin-Grand, paru dans L’Obs du 26 mars.

« Il est tard sur la terre. » Nous sommes en 1768 et Walter David Grassie voit le jour à Edimbourg. Sa mère, en le mettant au monde, y a laissé la vie. D’emblée, Alain Gnaedig, habile conteur (et jubilatoire semeur de citations anachroniques), donne le ton. Son ironie voltairienne et sa subtile empathie suscitent un attrait immédiat pour son héros, né dans une famille calviniste d’avocats et dont le père, James, « incarnait à lui seul la fière race des pense-petit ». Heureusement, son grand-père, Kenneth, veille à ce que lui soit prodiguée la meilleure éducation. C’est ainsi que Walter, formé aux humanités, aux sciences et grand amateur d’antiquités, quitte son « pays de l’horizon lointain » en 1789 pour faire le Grand Tour. Après Londres et un passage à La Flèche « sur les traces de Hume », le jeune Candide arrive à Paris à la veille de la Révolution. La « vision des têtes sur des piques » la lui fait fuir. Après un court séjour en Suisse, il arrive à Venise, où on l’initie à la franc-maçonnerie et au bordello. Chaque étape lui dessille les yeux. « Dans le monde, tout était vrai et tout était faux à la fois, tout n’était qu’apparence et reflet, tout était double (…), chaque être avait son avers et son revers. »

Que se passe-t-il quand un écrivain nantais parle d’un autre écrivain nantais? Cela donne une critique de Jean-Louis Bailly sur Le Pays de l’Horizon lointain, dans le nouveau numéro de la revue Place Publique (n° 74):

« Alain Gnaedig vit à Nantes ; mais l’horizon d’un homme qui a traduit du danois, du norvégien, du suédois et de l’anglais une centaine d’ouvrages est plus vaste que celui de son village – comme celui de Walter Grassie, héros de son troisième roman, Le Pays de l’horizon lointain.
Cet horizon est celui de l’Écosse, où il est né en 1768 et où il mourra. Entretemps il aura accompli, à l’orée de l’âge adulte, son « grand tour », vu la France, l’Italie, la Suisse, les Pays-Bas. Il aura aimé, eu des enfants, mené une vie professionnelle prospère. Alain Gnaedig nous conte cette vie en des pages fiévreuses, fourmillant d’hommes et d’idées. (…)
Le roman d’Alain Gnaedig tient la gageure d’être à la fois vif et profond, dense par la réflexion et léger par l’écriture. La vaste culture de l’auteur, la précision de ses références affleurent en permanence, sans jamais paraître pédantes. Les noms propres sont ceux de personnages réels, (sauf quand, par une malice plus riche de sens qu’il n’y paraît, il y mêle son anagramme Daniel Gaigan, tiré de son premier roman). Ainsi le lecteur nantais rencontre au détour d’une page un Dobrée de Guernesey…  (…)

Mais Gnaedig, sans rien sacrifier de sa réflexion sur l’homme pris dans la durée ou la « nature réelle des motivations » de chacun, sait aussi comme personne évoquer en quelques phrases la puissance des odeurs, parfums floraux comme puanteurs urbaines, ou brosser le portrait sensuel et lumineux de la « femme viking » que le héros ne cessera d’aimer, cette Fiona qu’il surprend un jour « seulement vêtue de trois de ses baisers ». Cette approche à la fois intellectuelle et sensible du monde n’est pas la moindre réussite du roman.
Walter Scott apparaît plusieurs fois au fil des chapitres ; il n’a pas publié ses grands livres encore, mais, en écrivant des traductions, a appris l’art de manier les mots avec précision, audace et subtilité, excellente façon de « se faire la plume ». Il est clair, à la lecture de ce petit livre bien plus vaste que ses cent cinquante pages à l’écriture parfaite, que la méthode a réussi à Alain Gnaedig, traducteur de métier et superbe écrivain.

Il est paru une analyse critique extrêmement fouillée et intelligente du Pays de l'horizon lointain sur le site de La Viduité.
(…) "Face à l’oubli des jours, l’ellipse des saisons, dans une langue d’une vive sécheresse, Alain Gnaedig dessine le destin ordinaire d’un homme curieux et perplexe, perdu entre désespoir et illusion. En ses très brefs chapitres, Le pays de l’horizon lointain décrit ce qui nous échappe, les soubresauts du plaisir, les tumultes de l’histoire collective, tous les symboles dont on se leurre pour affronter perte et passage du temps."
(…) "On peut envisager Le pays de l’horizon lointain comme une mise à la question de la possibilité même d’un roman historique, de ses étouffantes reconstructions historiques documentaires. Il y aurait dans ce roman dès lors une indéniable rigueur rieuse : l’assurance de ne pouvoir parler que de ce que l’on est certain de saisir. Autant dire ce moins que rien dans lequel toutes nos vies s’écoulent."
(…) Avec une belle, c’est le cas de le dire, économie de moyen, Alain Gnaedig jamais ne se perd dans le détail ou le superflu. Ses phrases lapidaires décrivent pourtant néanmoins la fin d’un monde, l’éclosion incertaine d’une mentalité nouvelle. (…) Le pays de l’horizon lointain apporte une touchante explication à cette croyance, maçonnique, du symbole dans toute chose : une angoisse temporelle dont Alain Gnaedig nous fait toucher du doigt. (…) L’Histoire ne se répète pas, il lui arrive pourtant de bégayer. On sait rien de la vie d’un homme, le roman nous le rend dans ses silences et dans sa certitude du trop tard. Une phrase s’impose comme un mantra : il est tard sur la terre. Dans l’illusion et l’opium, Walter peut avoir un instant l’illusion d’arriver à un monde en éclosion, une terre où il serait tôt. La vie ne tarde jamais à imposer ses deuils, aucun individu ne se confond jamais totalement avec une période historique. (…) 
Tout romancier, in fine, ne fait pas mieux que Walter Grassie : il paie en fausse-monnaie son acharné refus du temps perdu. Insistons encore sur le fait que Le pays de l’horizon lointain parvient à n’être pourtant nullement théorique : le lecteur se laisse porter par les autres évidences effleurées dans le voyage par Walter, sa quête des sens, son amour éperdu et l’élégante mélancolie qui enchante les pages de ce bref roman.
Que fait Alain Gnaedig quand il ne traduit pas de la littérature scandinave ? Et bien, il écrit des romans ! Le pays de l’horizon lointain édité chez Joëlle Losfeld est son petit dernier. Un court roman rondement mené qui fait immédiatement penser à Un coeur simple de Gustave Flaubert ou encore à Soie d’Alessandro Baricco.
La virtuosité d’Alain Gnaedig tient à son écriture brève et à l’élégance de la langue (chaque mot est pesé), mais également à l’esprit qui irrigue cette fable initiatique où « tout est symbole », nous dit l’auteur.
Comme dans les paysages du Nord, on avance et on oscille entre ombres et lumières. (…) Dans ce voyage, Walter sera initié aux diverses Sociétés, aux beautés et aux plaisirs du monde; il va faire l’expérience de l’absinthe, de l’opium et de la franc-maçonnerie. Il va aussi dessiner. De retour en Ecosse, il va découvrir l’amour avec Fiona, une femme viking, qu’il épouse et promet de toujours aimer. (…)
Surtout, dans ce récit bref, on perçoit toute la jubilation de l’écriture et l’érudition de l’auteur : Alain Gnaedig est féru de culture écossaise. Walter Grassie, son personnage d’invention, va côtoyer James Watt ingénieur qui va améliorer la machine à vapeur ou encore le géologue James Hutton. Le poète Robert Burns est également convoqué.

Roman bref, mais propos ambitieux, car cette histoire, qui questionne l’inscription du destin individuel dans l’Histoire et la philosophie des Lumières (sont également conviés Adam Smith, David Hume, Chateaubriand), est sous-tendue par l’idée forte que tout à son revers. Comme le dit l’auteur : « tout était vrai et tout était faux…. chaque être avait son côté pile et son côté face ». On comprend mieux pourquoi Walter, le héros (mi-alchimiste, mi-rêveur) aime collectionner les pièces de monnaie… En effet, le pivot de ce récit est avant tout le personnage William Brodie qui inspira à Robert Louis Stevenson son roman L’Étrange Cas du docteur Jekyll et de M. Hyde. On en vient à se demander quel est donc ce « pays de l’horizon lointain » : L’Ecosse ? L’âme d’un pays ? L’âme humaine ?
À l’heure où les librairies rouvrent ou ré-ouvrent, je vous recommande ce roman dont la petite musique ne vous quittera pas de sitôt … au fil du récit, il y a du rythme et de  l’entrain, mais aussi une douce mélancolie, comme le léger épanchement de notre planète qui fait dire plusieurs fois à l’auteur « qu’il est tard sur la terre. » Définitivement trop tard !
Lisez et vous comprendrez pourquoi tout est symbole. That’s it !

Belle chronique de Didier Ters, publiée sur le site Boojum, qui parle du Pays de l'horizon lointain comme d'un "roman stendhalien."

"Comment un jeune Ecossais de bon aloi, nommé Walter Grassie, avocat autant qu’amoureux, regarde-t-il vivre l’Europe du XVIIIe siècle ? C’est ce que raconte le petit livre d’Alain Gnaedig, au joli titre Le Pays de l’horizon lointain. "
(…)

Mais ce n’est pas Stendhal qui écrit, malgré quelques analogies, c’est bien Alain Gnaedig, qui fait danser la grande Histoire avec la petite. Et il raconte avec charme et finesse « cette orgie de sensations » dont notre Ecossais est si friand. Au-delà du récit lui-même, il peint une vie d’homme, presqu’ordinaire, s’il n’était si sympathique et curieux de tout. Simple voyageur dans le temps et dans l’espace, il est une parfaite illustration, en ces temps bien troublés, de la capacité de l’homme à choisir son destin.

Didier Ters


Une chronique de la journaliste romancière Elise Fischer publiée sur son blog « Lili au fil des pages »

C’est un livre peu ordinaire que publie Joelle Losfeld.
Avec Le pays de l’horizon lointain, Alain Gnaedig, auteur et éditeur nous raconte l’histoire de Walter Grassie, un écossais qui voit le jour en 1768. Sa naissance dans un milieu aristocratique est marquée par la mort de sa mère qui perd la vie en lui donnant la sienne. (…)
Ce court roman rythmé sur le temps. De très brefs chapitres ciselés, sculptés montrent la vie d’un homme, son histoire dans la grande Histoire. Quel effet l’Histoire peut-elle avoir sur le devenir et les destinées des êtres ordinaires ? Il était horriblement tard sur terre. Avec ici et là, des conclusions de chapitre – l’idée du temps passé ou à venir– qui reviennent de façon lancinante. Nous ne pouvons rien face à cette fuite du temps, sauf lire, relire, ausculter ce pays de l’horizon lointain. Nous venons de là…
Fasse pour chacun qu’il ne soit pas trop tard sur cette terre !

Les libraires en parlent…


Un vrai moment de plaisir !


Avec Walter Grassie, écossais de bonne famille né en 1768, nous parcourons l’Europe de l’entre-deux siècle. 
Les chapitres très courts d’Alain Gnaedig, presque un par année, nous donnent la vision d’une époque en un battement de cil, à travers la vie de Walter Grassie, de sa naissance à son dernier souffle.

Sarah - L'embarcadère

Un épisode du Journal de Lecture de Mérédith Le Dez, écrivain et libraire au Pain des Rêves, à Saint-Brieuc.

Aujourd'hui nous avons le plaisir de vous présenter un court roman original, subtil, intéressant, élégant et très finement amusant et grave à la fois. Voici donc "Le pays de l'horizon lointain" d'Alain Gnaedig, paru en février dernier aux éditions Joëlle Losfeld.
Alain Gnaedig est traducteur et éditeur pour le domaine scandinave de la collection "Du monde entier" aux éditions Gallimard. Il est aussi romancier mais c'est avec ce troisième roman que nous découvrons son écriture, et nul doute que bientôt nous lirons ses deux premiers livres "Opus incertum" (Calmann-Lévy, 2000) et "L'Homme armé" (L'Arbre vengeur, 2011).
Aucune faiblesse de style dans ce roman maîtrisé - il faut le souligner car c'est bien rare - construit en courts chapitres qui relatent selon l'ordre du calendrier le destin d'un Ecossais, Walter Grassie, de sa naissance en 1768 (comme Chateaubriand...) jusqu'à sa mort en 1818. Notre héros issu d'une riche famille d'Edimbourg, destiné à devenir avocat, reçoit une solide éducation protestante avant de parfaire sa formation en Europe, à l'occasion d'un Grand Tour, idée très en vogue à l'époque. Nous sommes alors en ... 1789 et Walter Grassie reviendra chez lui en 1791, le 21 juin, jour de l'arrestation à Varennes de Louis XVI...
"Le pays de l'horizon lointain" est un roman ciselé qui ne cède en rien aux facilités narcissiques en vogue. Nous vous en recommandons vivement la lecture!

Coup de cœur de la librairie Durance à Nantes

Le mot de la libraire
« Le monde est vraiment noir et compliqué » aux yeux d’un enfant comme dans le regard d’un homme, et cela quelle que soit l’époque. En déroulant la vie de son personnage, Alain Gnaedig nous en fait une superbe démonstration.
Né au 18e siècle dans une famille écossaise fortunée et prospère, orphelin de mère, Walter Grassie grandit dans la tradition protestante. Son père, « qui incarne à lui seul la race des pense-petit », sa tante imbue de religion et son grand-père, avocat, partisan du progrès et qui détonne dans cette lignée par son ouverture d’esprit, donnent à Walter une vision contrastée du monde.
Walter, une fois ses études achevées, entreprend un voyage d’éducation ; il quitte Edimbourg pour l’Europe. A Paris qu’il quitte de façon précipitée pendant la Révolution « quelque chose de pourri au royaume de France », il voit le sang et goûte au parfum sulfureux des salons. Il gagne la Suisse où il trouve le loisir de parfaire ses connaissances et de prolonger les plaisirs. En Italie, c’est une vision de richesse, la profusion « d’épices, de vices, d’ors et de trésors », un tourbillon de curiosités pour les esprits les plus insatiables. Il y apprend à apaiser tous les problèmes humains en goûtant l’opium et sa pensée se brouille, vision kaléidoscopique d’un monde fragmenté, avec « potences et gibets » mêlés aux visages et aux corps des femmes.
Il y a des odeurs entêtantes et de doux parfums qui saisissent le lecteur tout au long de ce roman érudit et d’une écriture très élégante.

Hélène